L’herbe est-elle plus verte à Paris ?

Article : L’herbe est-elle plus verte à Paris ?
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13 novembre 2017

L’herbe est-elle plus verte à Paris ?

Nombre de personnes désirent s’immerger au cœur des échanges interculturels, mais souvent, une fois qu’elles s’y trouvent, elles les fuient. Elles se rendent compte que les affiches attrayantes des agences de voyages, sur lesquelles un sourire fait l’affaire, ne sont pas le reflet de la réalité.

Paris nous donne un défi pour aller à la découverte des échanges interculturels
A la découverte de Paris. Crédit photo : KB

Un jour, un ami m’a dit qu’il aimerait bien être comme moi et une partie de son entourage : tout abandonner et partir longtemps dans un pays où le soleil brille davantage, afin d’oublier ses problèmes et de simplement profiter de la vie ; mais il a son travail, sa maison et un crédit à payer. Voyager et découvrir d’autres cultures sont des expériences sans doute agréables, mais quand j’entends de pareilles phrases, j’entends surtout le regret. Comme si partir était le seul moyen d’avoir une vie de rêve remplie de rencontres, de découvertes et d’échanges interculturels.

Il est bien beau de croire que l’herbe est plus verte ailleurs, mais il est délicat d’apprécier un lointain voyage si l’on n’apprécie pas le quotidien sur place. Certains sont trop exigeants par rapport à leurs rêves et sous-estiment ce qu’ils ont à leur portée. Soit ces gens ne partent jamais, soit ils fuient en laissant tout derrière eux, y compris les êtres chers.

Je dirais que c’est un effet de huis clos : tu es enfermé avec des individus qui, d’après toi, ont vécu une expérience positive inoubliable que tu n’as toi-même pas eu la chance de vivre, mais au lieu de profiter de cette expérience (généralement volontiers partagée), tu préfères rester dans ton coin, et, en interdisant à ces individus de s’approcher de toi, tu te retrouves dans un espace encore plus restreint. Car tu crains d’être jaloux ou de ne pas vraiment comprendre leur ressenti.

Tu te places en dehors de l’expérience interculturelle car tu penses que l’unique façon de devenir comme ces gens-là, c’est de partir. Mais si tu n’es pas capable d’absorber cet échange chez toi, dans ton petit espace, il est fort probable que tu ne l’absorberas nulle part. Tu tenteras de faire connaissance mais cela demeurera superficiel car dès qu’un malaise sera ressenti, tu couperas tout contact avec autrui. En ne saisissant pas l’opportunité de cette ouverture interculturelle, tu t’enfermes dans l’idée que le seul moyen de découvrir le monde, c’est de partir.

Je faisais partie de ces gens pour qui les limites n’existent pas, je désirais toujours plus que ce que j’avais. Cela m’a pris des années pour comprendre que quoi qu’il m’arrive, je voudrais toujours de nouveaux défis, de l’adrénaline ; l’objectif atteint n’avait aucun intérêt pour moi. Mes découvertes interculturelles s’arrêtaient à mon arrivée sur un territoire inconnu parce que réaliser un voyage était un défi. En profiter n’était qu’un simple loisir sans but. Après avoir compris ceci, j’ai commencé à apprécier l’instant, à voir au-delà des petites choses, à m’étonner des détails que je n’avais jamais remarqués auparavant.

Je me sens parisienne et si quelqu’un me dit le contraire, je le prendrai mal.  Je connais bien Paris et j’adore me retrouver dans une ruelle inattendue. Je me demande combien de Parisiens s’arrêtent pour admirer la ville et la prendre en photo. Depuis cet été j’ai pris l’habitude d’aller à la découverte de petits quartiers et effectivement, les gens me considèrent comme une touriste, me demandent si j’ai besoin d’aide. Cela me donne l’impression désagréable qu’il est inconcevable qu’un local puisse admirer sa ville.

J’apprends à apprécier ce que j’ai, ce que je vis en cet instant. Je chéris les rencontres avec des personnes d’origines différentes, j’aime poser des questions paraissant peut-être sottes sur des coutumes et des clichés de leur pays. J’adore mentionner que j’ai un.e ami.e de telle nationalité m’ayant fait part de telle anecdote. Cela peut s’appeler la curiosité, l’ouverture d’esprit ou la bienveillance : les fameux composants de la compétence interculturelle.

Je sais de mon expérience qu’il faut commencer à appliquer ces techniques chez soi avant de partir à l’aventure. Je veux bien sûr appréhender non superficiellement d’autres pays ainsi que leurs véritables caractéristiques culturelles, mais c’est à Paris que j’ai décidé de m’installer. Cela ne m’empêchera pas de continuer à faire de nouvelles découvertes, grâce à l’internationalisation de nos villes. Pour moi l’herbe est plus verte ici, mais je suis bien curieuse d’apprendre à discerner toutes ses nuances.

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Commentaires

Aipery
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L'article est super bien écrit et reflète complètement ce que je ressens.
Parisiens, vivant dans une des plus belles villes au monde, on n'en profite pas! On cours toujours, on cherche à prendre le métro au plus vite, à rejoindre le lieu de travail, sans vraiment regarder les paysages autour.
Il faut qu'on apprenne à vivre l'instant présent et être plus heureux aujourd'hui.