L’exclusion aux Jeux olympiques de Paris 2024

Article : L’exclusion aux Jeux olympiques de Paris 2024
Crédit:
16 juillet 2024

L’exclusion aux Jeux olympiques de Paris 2024

À partir du 26 juillet, les Parisiens, les personnes de passage à Paris et les athlètes vont vivre une expérience unique avec les Jeux olympiques de Paris 2024, qui se veulent les plus inclusifs et accessibles jamais organisés. Mais comment l’inclusion fonctionne-t-elle et comment peut-on retomber dans son opposée, l’exclusion ? Découvrez ici quelques principes de l’inclusion et de l’exclusion à travers le cas des Jeux olympiques de Paris 2024.

© Thomas Padilla / AP

L’inclusion, de quoi parle-t-on ?

Les droits civiques, le féminisme, les luttes contre les discriminations raciales et homophobes ont lancé la recherche de l’égalité pour chaque individu, c’est-à-dire l’inclusion. Cela est devenu une urgence aux XXe et XXIe siècles. Par principe, l’inclusion est un mécanisme qui permet d’intégrer toutes les personnes diverses dans un système. Cela permet aussi de proposer des opportunités équitables à l’ensemble de ces personnes.

Ainsi, l’inclusion repose sur certains principes fondamentaux. Comme les JO de Paris se proclament les plus inclusifs, voici quelques exemples d’actions qui correspondent à ces principes. Cela permet de voir comment l’inclusion se construit.

Les principes de l’inclusion aux Jeux Olympiques de Paris 2024

1. Accessibilité

Le métro de Paris, déjà l’un des réseaux de transport en commun les plus denses et les mieux desservis au monde, a été agrandi par de nouvelles stations. De plus, sur les stations où les événements auront lieu, des indications visuelles signalant les zones et/ou noms de stade ont été ajoutées. De même pour les wagons de métro. En outre, une application mobile permettant de se renseigner en temps réel sur les activités des JO est déjà téléchargeable sur les plateformes d’applications mobiles.

2. Engagement communautaire

La flamme olympique n’est probablement pas arrivée à Marseille par hasard (le reportage de France 2 du 15/07/2024). Le relais a également été passé dans un quartier défavorisé pour envoyer le signal que cet événement sportif concerne et est ouvert à tous.

3. Environnement accueillant

Les aéroports et les hôtels se préparent pour l’arrivée des touristes. Des indications en anglais se propagent dans des lieux tels que la poste.

4. Formation à la diversité

Des fiches pédagogiques destinées aux élèves du cycle 2 et du cycle 3 utilisent les Phryges, les mascottes des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, pour parler de l’inclusion.

Phryge olympique lors du relais de la flamme olympique de Paris 2024, à Brest / MFonzatti via Wikicommons

5. Parité et diversité

Comme pour les éditions précédentes, les JO de Paris 2024 accueilleront une équipe d’athlètes réfugiés.

6. Sensibilisation

Depuis des mois, l’espace médiatique et les services dédiés à la promotion des Jeux en parlent sous de multiples angles. Les brochures envoyées aux adresses postales parlent des préparatifs pour les JO.

7. Participation

La billetterie, ouverte et intuitive, permet de réserver des places pour différentes activités pour les Français comme pour les étrangers. De nombreux jeux de loterie ont été mis en place par des partenaires officiels pour permettre de gagner des places pour les Jeux.

Inclusion ? Exclusion ?

Si on recherche les mots clés « inclusion » et « JO » sur n’importe quel moteur de recherche, on constate que cette thématique a été bien abordée. D’abord, par le comité olympique dans ses promesses de rendre ces JO les plus inclusifs et paritaires possibles. Ensuite, par les journalistes et les associations qui pointent de nombreux problèmes avec l’inclusion dans le cadre des Jeux Paralympiques.

Un état des lieux a été réalisé pour identifier les améliorations nécessaires afin de permettre aux athlètes et aux spectateurs en situation de handicap de profiter des événements. Les problèmes identifiés incluent le manque de chambres adaptées et de stations de métro non équipées d’ascenseurs fonctionnels.

Cet état des lieux souligne que les principes de l’inclusion ne fonctionnent pas en totalité. Cela nous amène vers l’exclusion, qui repose également sur des principes qui la font exister.

Les principes de l’exclusion aux Jeux Olympiques de Paris 2024

1. Abandon de la participation

Les médias alertent sur une baisse visible des réservations d’hôtel et donc des venues potentielles de touristes. Cela est accompagné par l’exode des Parisiens pendant la période des JO et le télétravail complet proposé par des entreprises franciliennes.

2. Inaccessibilité

Le métro, avec sa tarification très élevée pour la période des JO, reste un geste de communication qui irrite. Les discussions publiques ne sont plus seulement nationales ; les visiteurs sont probablement conscients qu’ils paient le double du tarif habituel. De plus, la logistique de fonctionnement par zone et les restrictions de circulation vers ces zones lors des épreuves risquent de provoquer des embouteillages et des difficultés de navigation à travers la ville.

3. Arrogance des représentants publics

Certaines vidéos de représentants officiels, comme Valérie Pécresse, ont envoyé des messages d’arrogance et d’élitisme concernant l’événement. La vidéo, où elle expliquait la nécessité de fermer certaines stations de métro alors qu’il aurait simplement suffi de descendre une station plus tôt et de marcher à pied pour se rendre sur place, a fait le tour de France. Cela a été mal perçu par le public.

4. Négligence des déterminants socio-économiques

Avec mon propre exemple, une personne inscrite au jeu de billetterie des JO pour acheter une place parmi les premiers, je constate que les billets pour assister aux compétitions ont été vendus initialement par packs. Cela a considérablement augmenté le prix final. Il n’était pas nécessaire d’acheter au moins quatre billets pour une même épreuve pour une seule personne comme moi. De plus, la cérémonie d’ouverture, très prisée, a vu ses prix rapidement grimper jusqu’à atteindre des chiffres à trois zéros. C’est le point de vue d’une Parisienne. Pour les touristes, les coûts associés pour venir assister à cet événement historique restreignent considérablement le nombre de personnes pouvant se le permettre.

En parallèle, il existe des pratiques visant à faire des JO un produit de luxe réservé à une minorité aisée capable de le financer.

5. Désengagement communautaire

On n’a pas cessé d’entendre des récits sur le déplacement des résidents locaux à qui l’on promettait de gagner un peu d’argent. De plus, cela aboutissait parfois au délogement d’étudiants ou de demandeurs de logements sociaux. Cette situation est discutée dans Libération.

6. Inégalité

Les athlètes russes et biélorusses, indépendamment de la politique de leur pays et représentant uniquement leurs compétences sportives, ne pourront tout de même pas défiler lors de la cérémonie d’ouverture des JO. C’est une décision finale du Comité International Olympique (Le Monde).

7. Désensibilisation ou indifférence

Un événement d’une telle ampleur ne peut pas fonctionner sans une interaction appropriée entre les hôtes – les Parisiens, les athlètes invités et les touristes. Il est crucial de se préparer concrètement à l’arrivée d’une masse de touristes dans une ville déjà densément peuplée. Il est également essentiel de savoir comment réagir face aux situations d’incivilité et / ou de danger.

Alors, l’inclusion?

Alors, ce système des JO est en réalité très divisé. D’un côté, les organisateurs cherchent à offrir le meilleur aux athlètes et aux touristes, même si cela signifie que les Parisiens doivent parfois sacrifier leur confort pour le bien de la majorité. D’un autre côté, les Français évitent Paris pendant les Jeux et critiquent la mauvaise organisation du Comité olympique. De plus, certains touristes sont surpris par l’hostilité des Parisiens et des organisateurs qui cherchent à « budgeter » l’événement. Ce que l’on observe à Paris, c’est une division entre différents groupes exclus du système d’une manière ou d’une autre. Ce qui n’est pas de l’inclusion.

Il se peut que dans nos mentalités actuelles, il soit difficile d’imaginer une véritable inclusion, où chacun trouve sa place dans un système uni, sans besoin d’opposer les uns aux autres pour que cela fonctionne. Actuellement, nous avons tendance à voir le soi comme opposé à autrui. Nos sens ne sont peut-être pas encore prêts à percevoir la différence comme complémentaire. Comme une mesure structurante vers une interculturalité avancée.

Paris est une fête ?

Est-ce global ? Est-ce culturel ? Selon Magaly Siméon, blogueuse, fondatrice de @lilyfacilitelavie et militante pour le futur du travail humain, cette tendance a transformé quelque chose qui devrait être une fête nationale en une série de contraintes semble très française. Les voix rares qui soulignent que les JO pourraient être enrichissants, stimulants, et remplis de rencontres sont souvent sous-représentées. À mon sens, l’idée des JO devrait permettre de tirer le meilleur des athlètes, des autres et de soi-même. Les JO de Paris 2024 représentent un énorme potentiel inexploité.

Moi aux JO ?

À 9h du matin à Montmartre, avec d’autres personnes attendant impatiemment le passage de la flamme olympique, je médite sur les principes de l’inclusion et de l’exclusion. J’ai fait un pas pour en faire partie des JO… Espérons que la prochaine fois, nous serons tous inclus aux JO, dans un système véritablement inclusif et interculturel, peut-être dans 100 ans.

Le relais de la flamme de Paris 2024 au parvis du Sacré-Cœur, comcult
Partagez

Commentaires