Je ne tolère pas, j’analyse

Article : Je ne tolère pas, j’analyse
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8 août 2018

Je ne tolère pas, j’analyse

Ce post est un point de vue non populaire sur un sujet sensible qui peut submerger certaines critiques. Je vous prie de ne pas faire des conclusions rapides, prenez le temps nécessaire pour réfléchir et comprendre ce que je veux dire par les mots durs et limités. Je n’ai pas des réponses à tous les problèmes interculturels, je me questionne et je vous invite à une discussion saine.

Tolérance
« Tolerance » by Mary Mackay, Berlin Wall, Berlin
Crédit : Flickr

 

Que veut dire la tolérance?

Dans le monde interculturel on demande souvent d’avoir de la tolérance vis-à-vis d’autrui. Tout le monde tolère sans cesse tout le monde. Mais avez-vous déjà eu l’impression que derrière la tolérance des certaines personnes se cache l’indifférence.  « J’accepte la présence d’autrui, tant que cela ne me touche pas, tant que ce n’est pas dans mon quartier, tant que la personne en question ne s’adresse pas à moi directement ». Ils ferments les yeux, ils préfèrent ne pas savoir ce qui existe, ce dont les gens ont vraiment besoin.

Pour moi, la vraie tolérance n’est pas une acceptation que l’autre et ses problèmes existent quelque part. Pour moi, c’est l’analyse des moments irritants, du comportement inattendu et surprenant. Mais c’est aussi des questions et la recherche des réponses dans un endroit plus sombre de notre inconscience. Là où notre espace personnel est devenu invasif par la présence (involontaire) d’autrui.

Il y a quelques années, quand les médias ont parlé constamment de l’arrivée des réfugiés accueillis en nombre en Allemagne, j’ai suivi un reportage sur la  collocation  entre des allemands et des demandeurs d’asile. L’idée était qu’une famille allemande loue une chambre de sa maison à un réfugié, voire à une famille entière de demandeurs d’asile. Le loyer était payé par l’État ou des associations. Une famille allemande qui a accueilli une famille syrienne, a témoigné pour ce reportage. Ils décrivaient leur quotidien où une chose importante était les dîners ensemble. Tout comme la famille allemande présentait la cuisine traditionnelle, leurs colocataires leur apprenaient aussi la cuisine syrienne. Sans aucun doute cela a permis la meilleure intégration.

Cela m’a énormément marquée. Au contraire des mots solidaires ou des dons d’argent aux personnes abstraites, c’était une vraie bravoure d’inviter des étrangers, des inconnus à sa table, partager ce qui semble très simple, le repas. Ce geste est extrêmement difficile : la nourriture, les capacités culinaires, les habitudes nutritionnelles et les goûts varient tellement d’une personne à l’autre que rien que l’odeur inhabituelle peut causer un blocage et donner l’envie de s’éloigner de la personne.

Or, la tolérance est réelle lorsque la personne est prête à partager le pain avec un inconnu dont la présence même peut gêner.

Vous pouvez vous renseigner à propos de cette initiative de partage de logement via le site d’une plateforme

www.fluechtlinge-willkommen.de

dont le but est de ne pas laisser les réfugiés vivre dans les camps, mais avoir leur coin sécurisé et bienveillant.

La tolérance, c’est le doute

Dans le management interculturel, on nous apprend à être curieux et à l’aise. Mais pour arriver à ce stade, à mon avis, il faut faire un grand travail sur soi, sur ses peurs, ses incertitudes. Cela ne veut pas dire que vous ne ressentirez jamais la gêne, que la présence d’autrui ne vous déstabilisera jamais. Mais vous devez comprendre pourquoi cela vous arrive pour dépasser cette irritation.

La non-violence et le respect font partie de mes règles principales. Mais même avec cette approche-ci, ce serait un mensonge si je disais que je suis comme un poisson dans l’eau dans n’importe quelle culture et que je tolère tout homme sur Terre.

J’ai fait mon coming-out et ai honnêtement admis que je ne peux pas tolérer une certaine culture. Je me suis excusée auprès des amis de ce pays,  et j’ai expliqué pourquoi. Mais il y a des choses que je ne pourrais jamais accepter, ni voir se passer près de moi. Je n’accepte pas le comportement arrogant, ni la posture de supériorité intellectuelle et de droit vis-à-vis des femmes, je ne tolère pas l’idée que l’on doit faire tout pour quelqu’un qui a un statut important ou juste une idée qu’il a de ce statut. Bien sûr, cela ne venait pas de nulle part, cela venait de mon expérience personnelle et j’ai fait ce genre de concision. J’ai honte. Mais je ne laisserai pas passer ce comportement inacceptable pour moi.

La tolérance, c’est l’analyse

Il est inutile d’être tolérant dans ce cas. Je suis pour l’analyse. Je travaille sur moi-même. Pire si j’ai ignoré mon comportement. Je cherche les raisons, je cherche les réponses dans mon éducation aussi, dans ma culture.

Il existe les différences culturelles, mais il existe les valeurs humaines aussi. Il y a les habitudes et coutumes qui peuvent me paraître bizarres mais je ne vais pas démunir mon respect à cause de ça. Je vais essayer de comprendre ou au moins accepter que quelque part cela fasse aussi du sens. Mais là où la dignité d’une personne est touchée, je ne pourrais jamais l’excuser par la différence des cultures. C’est absurde. C’est hypocrite.

La tolérance, c’est le doute, le doute sur ses capacités d’analyser. C’est la reconnaissance de la possibilité que nos croyances puissent être confondues, que nous sommes tombés dans un jugement primitif.

La tolérance, c’est la critique

La tolérance est aussi d’accepter la critique. Quand sur la terrasse d’un café on me dit : « Vous, les Russes, vous êtes des envahisseurs ! Vous avez occupé la Crimée et vous n’avez rien eu ». Vous ne pouvez pas contredire parce que c’est la vérité et le moindre commentaire peut être vu comme la défense et le déni. Personne ne dit que la tolérance et le respect sont faciles. Bref, il fait avaler la critique et analyser.

Je suis humaniste. Je privilégie la nature de notre être, nos origines. Nous ne sommes pas parfaits et ne le serons jamais. Mais nous devons faire de notre mieux.

Nous sommes tous capable de bonté, d’amitié, d’amour. Mais nous n’avons pas tous la même façon de penser, les mêmes goûts, les habitudes qui sont uniques en quelque sorte pour chaque individu.

Nous avons encore cet atavisme de protéger notre territoire, cette peur que si quelqu’un s’approche vers nous, c’est pour nous faire du mal. La tolérance ne vient pas naturellement, il faut avoir la volonté d’accepter autrui et la patience de le comprendre.

Quelle est votre approche de la tolérance ? Que pourriez-vous ne jamais tolérer ?

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